L’industrie de santé et les géants de l’Internet et du numérique, deux univers parallèles, commencent à nouer des alliances pour avancer ensemble. Deux mondes qui apprennent à se connaître, c’est sans doute une nouvelle dynamique d’innovation pour une nouvelle solution de soins. Est-ce une solution d’avenir pour trouver des nouveaux médicaments pour soigner des malades ? En tout cas, c’est un défi que l’industrie pharmaceutique doit relever pour ne pas rater le virage du numérique dans un monde connecté.
Dans ce marché très concurrentiel, les laboratoires pharmaceutiques cherchent de nouveaux moyens d’innover. Le big data est de plus en plus considéré comme une voie privilégiée à explorer. L’exploitation des données de masse est-elle la panacée pour sortir de nouvelles molécules ? Pour le moment, personne n’est capable de dire s’il s’agit d’un filon ou d’une illusion.
Nous vivons dans un monde d’hyper-connectivité, qui génère des données numériques riches en information. Exploitées à bon escient, celles-ci peuvent fournir des renseignements précieux afin d’orienter et d’accélérer les recherches dans différents domaines, dont le médical. Grâce à une analyse poussée, les informations récoltées pourraient aider à mieux comprendre certaines maladies, tout comme le mécanisme d’action des molécules permettant d’apporter une réponse thérapeutique.
La compréhension et les renseignements tirés de ces données
numériques sont un maillon incontournable pour aboutir à la médecine personnalisée et à la thérapie ciblée. Pour cela, il faut des personnes capables d’analyser et d’organiser la compréhension de ces informations. Ceci passe forcément par la formation des futurs salariés et par la reconversion de celles et ceux dont le métier évolue. L’entreprise doit anticiper cette évolution par une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Avant tout, il y a d’abord des freins (pratiques, culturels et juridiques) à lever, et des vigilances à observer : Qui est dépositaire de ces données ? Sommes-nous prêts à partager des données que chacun produit ? Cela peut être au bénéfice et au détriment de qui ? Il convient d’avoir un cadrage réglementaire suffisamment strict sans pour autant empêcher toute recherche dans l’intérêt général commun. Il faut trouver un équilibre pour que le principe de précaution ne crée pas un frein excessif pour la recherche. Cependant, il n’est pas non plus question de bafouer le droit de la personne au nom du progrès scientifique.
Hormis les points soulevés précédemment, la FCE-CFDT, comme société civile et en tant qu’organisation syndicale responsable, doit rester vigilante sur la finalité de l’alliance entre les géants pharmaceutiques et de l’Internet tel que Google et IBM. La politique industrielle et financière de l’entreprise ne doit faire oublier la responsabilité sociétale des entreprises de médicaments. Cette alliance entre le secteur de santé et le numérique est-elle animée par l’ambition de trouver de nouveaux médicaments innovants plus efficaces, avec le moins d’effets secondaires possibles, ou par une opportunité de faire monter la valeur des actions ? La frontière entre les deux est mince. Si l’ambition financière l’emporte sur la valeur médicale, nous risquons d’assister dans quelques années à un désert thérapeutique. Il risque d’y avoir un clivage entre des maladies de « riches » et celles qui ne rapportent pas suffisamment d’argent. La recherche a besoin de temps. Si nous n’anticipons pas, un jour, quand nous nous réveillerons, il sera trop tard.
Le numérique et l’industrie pharmaceutique représentent un défi à relever, une opportunité à saisir, un virage à ne pas rater. Un passage incontournable pour réussir la médecine de demain, avec l’industrie du futur, à condition que tout le monde respecte les règles du jeu et que les entreprises ne détournent pas les outils pour des raisons financières au détriment des malades.